Arc-en-ciel

Ainsi elle vacille et n’en peut vraiment plus,
Il est temps maintenant le grand jour est venu.
De ses idées rangées, il ne reste plus rien,
Vient le passage à l’acte, ne suffit plus la main.
Tout s’est vite enflammé car son désir l’emporte
Et son souffle intérieur lui désigne la porte.

Elle saute du lit et l’appelle, c’est fait :
« Puis-je venir vous voir ? - Venez quand vous voulez ! »
Alcool fort à l’orange qu’elle va boire d’un trait,
De l’eau sur le visage qu’elle maquille frais
Et avec son parfum la voilà dans la rue
Où sous son long manteau tout son corps reste nu.

Au-dehors le vent gronde et se lève l’orage,
C’est le moment parfait pour disposer l’outrage
Comme un ciel vrai complice tout prêt à exploser
Qui suggère à nos corps d’aussi se libérer.
Elle va haletante, elle a tant résisté
Qu’elle court maintenant au-devant se livrer.

Qu’est-ce qui se passe en elle ? Plus rien ne la retient,
Comme si son désir la délivrait des liens.
Au fond elle a tranché et la digue a sauté.
Comment faire autrement quand semble venue l’heure ?
Elle n’écoute plus que sa voix intérieure
Qui lui dit du tréfonds : « Deviens ce que tu es ».
Comme « la joie de l’âme réside dans l’action »
Elle sait qu’il est temps de vivre ses passions.

Et tout en cheminant elle cherche au-delà :
Comment a-t-elle fait pour en arriver là ?
Comment a-t-elle pu, elle qui esquivait ?
Il est doux gai savoir quand il vient vous charmer.
La sagesse tragique serait-elle adoptée ?
Serait-ce là un signe de sa maturité ?
Ou bien un trait hélas de sa perversité ?
Ou le tout à la fois comme une ambiguïté ?
 
La tentation est là comment ne pas goûter ?
C’en est assez enfin ce soir je vais coucher
Et j’aurai l’impression d’enfin me révéler
Et d’aller jusqu’au bout de mon identité.

Heureuse aussi bien sûr de le récompenser
De sa cour affinée, il l’a tant désirée,
Et se sentir princesse est toujours accepté.
Tout cela valait bien un grand pas de côté.
 
Je serai femme enfin selon ma volonté,
Nous cueillerons ensemble toutes les voluptés.
Ce sont nos libertés que nous allons croiser.
La clandestinité pour bien persévérer
Sera le cachet fier de ceux qui savent aimer
Aujourd’hui comme hier et demain à jamais.

Elle rit se disant qu’il fait beau voir en vrai
La morale et l’éthique autrement convoquées.
Qu’il y a sous les pavé, une plage amoureuse
Et derrière les rochers des liaisons dangereuses
Où l’on voit se nicher la sagesse tragique
Et où l’on peut s’aimer en belle dialectique.
Très existentialiste cette envie de baiser,
Elle se sent légère et son pas est pressé.

Ses seins durcissent un peu sous les effets du vent
Qui fripon se faufile comme sous un auvent.
Vraiment tout excitée, c’est la peur maintenant,
Va-t-elle reculer ? Mais non, c’est trop tentant.

Voilà, tout près du but, qu’elle rougit un peu
Sentant sa chatte humide autant que dans les cieux.
Quelques premières gouttes annoncent la tempête.
Elle sonne à sa porte préparée à la fête
Et quand il vient ouvrir, très fort est son émoi,
Dans ses bras elle fond et lui dit : « Baisez-moi ».
Alors le ciel coquin vient les accompagner,
Et c’est un arc-en-ciel que l’on voit dans l’ondée.


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